-Allo, Maman ? Re bonjour, c’est moi, Inès. Je t’appelle pour te demander si par hasard, nous n’aurions pas laissé Teddy, le nounours de Lucas, chez vous cet après- midi ? Il reste introuvable ici.

-Ne quitte pas, je vais faire le tour de la maison, je te passe ton père pendant ce temps-là.

-Alors ma fille, tu cherches Teddy ?

-Oui Papa, c’est important de le retrouver rapidement parce que Lucas le réclame déjà. Tu sais depuis tout petit, il a pris l’habitude de l’avoir tout près de lui notamment le soir pour s’endormir. C’est son doudou en quelque sorte.

– Son doudou ?

– Oui, c’est ce qu’appellent les professionnels de la petite enfance, son objet transitionnel. Lorsqu’un enfant est séparé un certain temps de sa mère ou de son père, il garde tout auprès de lui son doudou et cela le maintient rassuré. Il supporte mieux cette séparation. Un objet transitionnel est utilisé par un enfant dès 5 ou 6 mois et c’est vers 18 mois-2 ans qu’il choisit son doudou préféré : un nounours, une petite couverture de bébé ou un mouchoir… qui n’est pas forcément celui acheté par papa maman. Il choisit son doudou en fonction de l’attirance sensorielle qu’il a pour cet objet, le toucher, l’odorat, les couleurs. Et il paraît que c’est une première preuve de maturité, le début de l’indépendance affective du petit enfant. En effet, il acquière la capacité de transposer son attachement vers un autre support.

– Ta sœur et toi n’avez pas eu de doudou ?

– Tu as raison Papa, tous les enfants n’ont pas forcément besoin de doudou. Le pédopsychiatre Marcel Rufo dit que certains petits ont des doudous « psychiques » parce que cela se passe dans leur tête, ils se rassurent en « pensant à quelque chose, un souvenir, une réflexion ». Pour des enfants c’est le pouce ou la tétine, et pour d’autres encore, c’est en lisant toujours le même livre, la même histoire qu’ils se rassurent.

– Oui, je vois, ce n’est pas inquiétant du tout de ne pas avoir de doudou comme tu dis, en fait vous vous êtes débrouillées autrement pour vous rassurer.

– Exactement !

– Et jusqu’à quel âge les enfants gardent-ils leur doudou ?

Ce peut-être 6-7 ans, mais le plus souvent ils le gardent jusqu’à 10-12 ans, selon les enfants. Ils le délaissent d’ eux-mêmes parce qu’ils n’en ressentent plus le besoin et c’est le signe qu’ils sont en capacité de gérer seuls leur anxiété. Le rôle des parents est de faire en sorte que cela se fasse progressivement. Par exemple en éloignant quelques heures le doudou dans la journée, mais l’enfant peut toujours le voir, puis plus tard, en dehors de la vue de l’enfant qui finira par l’oublier. Marcel Rufo considère que “Jeter un doudou sans que l’enfant n’en soit “sevré”, et cela quelque soit son âge, est un véritable sévice”. Par exemple, il déconseille fortement ” de laisser partir son enfant sans son doudou en classe verte ou pour aller dormir chez un copain, s’il est encore doudouphile ».

Doudou : où et depuis quand ?

– Si certains enfants occidentaux ont recourt aux doudous, j’ai l’impression que le phénomène doit être très rare, voire inexistant ailleurs. Tu sais, lorsque ta mère et moi avons passé une année en Afrique, je ne me rappelle pas avoir entendu parler de ce sujet. La proximité entre la mère et son bébé doit jouer. La maman africaine porte son petit à longueur de journée, enveloppé dans un haïk ou dans une grande serviette éponge : lorsqu’elle travaille, lorsqu’elle fait ses courses, ou même pendant les corvées. La nuit, le petit dort près d’elle, blotti contre sa poitrine. Cette très grande proximité semble permettre une socialisation plus rapide que chez nous la première année. Le jeune enfant, après, est confié à d’autres parents.

– Oui, papa, je suis d’accord avec toi, le phénomène doudou est essentiellement occidental.

– Et même de notre temps, continue Papy piano, on ne parlait pas comme cela de « doudou », c’était notre nounours.

– Tout simplement parce que c’est relativement récent. Donald Winnicott fut le premier à parler de l’objet transitionnel au début des années 1950, soulignant bien dès le départ, que leur existence était fonction des enfants.

– Ah, j’entends ta maman qui revient, oui c’est elle ! Alors ?

– J’ai retrouvé Teddy !

Ah !!!!! Bravo, tu es super, Merci !!! s’exclament en cœur Inès et son père. « Lucas va être heureux de le revoir» !

Et devinez où je l’ai récupéré ? Dans le placard à jouets, tout simplement !

– Eh bien, termine Inès, je passe le récupérer ! Heureusement les parents, que vous n’habitez pas trop loin de Nantes. Bisous et à tout à l’heure !

Ted doudou de Lucas